Licenciement injustifié : impossibilité de déroger au barème Macron

Dans son arrêt du 11 mai 2022, la Cour de cassation impose le barème Macron et refuse toute appréciation au cas par cas des préjudices subis par le salarié.

Selon la Cour de cassation, les juges ne sont pas autorisés à écarter le barème d’indemnisation de l’article L1235-3 du Code du travail, dit barème Macron, même s’ils estiment que ce barème ne fournit pas une indemnisation adéquate au salarié qui a subi un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dans cette affaire, une salariée de 53 ans qui avait 4 ans d’ancienneté a été licenciée pour motif économique. Le licenciement a été jugé sans cause réelle et sérieuse. En application du barème Macron, l’indemnité de licenciement injustifié devait être comprise entre 13211 € et 17615 €. La cour d’appel avait accordé à cette salariée 32000€ d’indemnités eu égard au préjudice financier subi pendant ses 2 ans de chômage.

La Cour de cassation rejette cette appréciation in concreto du préjudice subi par la salariée et casse l’arrêt de la cour d’appel pour ne pas s’être limité dans la fixation des dommages et intérêts au maximum du barème Macron.

https://www.courdecassation.fr/decision/627b537f4d359c057dd01cf4?search_api_fulltext=&date_du=&date_au=&judilibre_juridiction=cc&judilibre_chambre%5B0%5D=soc&judilibre_publication%5B0%5D=b&op=Rechercher%20sur%20judilibre&previousdecisionpage=0&previousdecisioni=

Le barème Macron est validé par la Cour de cassation

Avis n°15012 et 15013 du 17 juillet 2019 de la Cour de cassation.

Extraits de la note explicative de la Cour de cassation sur ces 2 avis :

L’article L. 1235-3 du code du travail, met en place un barème applicable à la fixation par le juge de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, celle-ci devant être comprise entre des montants minimaux et maximaux ; les montants maximaux varient, selon l’ancienneté du salarié, entre un et vingt mois de salaire brut.

La formation plénière de la Cour de cassation s’est prononcée le 17 juillet 2019 pour avis sur deux demandes d’avis formulées par des conseils de prud’hommes, relatives à la compatibilité de ce texte avec des normes européennes et internationales.

Elle a estimé que les dispositions de l’article 24 de la Charte sociale européenne révisée n’étaient pas d’effet direct.

Elle a estimé que l’article 10 de la Convention n° 158 sur le licenciement de l’OIT, était, quant à lui, d’application directe en droit interne.

La formation plénière en a déduit que les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail, qui fixent un barème applicable à la détermination par le juge du montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et prévoient notamment, pour un salarié ayant une année complète d’ancienneté dans une entreprise employant au moins onze salariés, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse comprise entre un montant minimal d’un mois de salaire brut et un montant maximal de deux mois de salaire brut, étaient compatibles avec les stipulations de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’OIT, l’Etat n’ayant fait qu’user de sa marge d’appréciation.

https://www.courdecassation.fr/IMG///20190717_note_avis_15012_15013.pdf

https://www.courdecassation.fr/43209

https://www.courdecassation.fr/43210    

 

Attention à l’avenant au contrat de travail quelques jours après un entretien disciplinaire

La Cour de cassation dans un arrêt du 9 mai 2019 juge que la modification du contrat de travail constitutive d’une rétrogradation du salarié (en l’espèce baisse de sa qualification et de son nombre d’heures de travail) proposée après l’entretien préalable à une sanction disciplinaire, doit être qualifié de sanction disciplinaire.

 

L’avenant mettant en place cette rétrogradation et signé par la salariée a été annulé car selon la Cour de cassation il s’agit d’une sanction mise en œuvre sans avoir fait l’objet d’une notification écrite motivée et sans que l’employeur ait informé la salariée de sa faculté d’accepter ou de refuser cette rétrogradation.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000038488759&fastReqId=1298539968&fastPos=1

Comportement sexiste de bénévoles et responsabilité de l’employeur

La Cour de cassation vient de juger que même si un comportement sexiste à l’encontre d’une salariée émane de bénévoles, sans lien de subordination juridique avec l’employeur, ce dernier doit agir immédiatement en cas de constatation de tels faits. A défaut il engage sa responsabilité pour violation de son obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs. En l’espèce les comportements sexistes se sont manifestés par l’insulte « sac à foutre » et des jets de salade, frites, œufs frais de la part de bénévoles d’une association sur une salariée de cette dernière présente dans les cuisines lors d’un diner organisée par cette association. Cour de cassation, chambre sociale, 30 janvier 2019 N° de pourvoi : 17-28905

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000038112097&fastReqId=1282011564&fastPos=1

La CNIL condamne à 10.000 € d’amende une société qui utilise une pointeuse biométrique

La société condamnée a une activité de télésurveillance d’ascenseurs et de parkings et emploie 14 salariés.

La CNIL a été saisie en 2015 à la suite d’une plainte concernant la mise en place d’un dispositif de vidéosurveillance/vidéoprotection. En 2016, la CNIL se déplace pour procéder à un contrôle et constate qu’un dispositif de pointage biométrique à des fins de contrôle des horaires des salariés était mis en œuvre, sans autorisation de la CNIL.

Une mise en demeure a été adressée en 2017 à la société de stopper ce dispositif. La société répond après une relance de la CNIL qu’elle arrête ce dispositif. La CNIL procède début 2018 à un nouveau contrôle pour vérifier la véracité de l’arrêt de ce système et constate que le dispositif biométrique est toujours actif.

Par délibération du 6 septembre 2018, la Cnil condamne alors la société à 10 000 € d’amende ainsi qu’à la publicité de sa décision pendant 2 ans.

Pour rappel, depuis le 25 mai 2018, le traitement des données biométriques est par principe interdit par le RGPD (art. 9) sauf exceptions listées par le RGPD.

Délibération Cnil du 6 septembre 2018

https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A32016R0679

Repas de fin d’année et salarié alcoolisé : attention à la non-assistance à personne en danger

La Chambre criminelle de la Cour de cassation a déjà eu l’occasion de confirmer la condamnation de 2 salariés à payer 5.000 € de dommages et intérêts aux parents et à la sœur d’un de leur collègue, pour ne pas avoir empêcher ce dernier de prendre le volant de son véhicule alors qu’il avait trop bu lors d’un repas de fin d’année. Le salarié alcoolisé, ayant perdu le contrôle de son véhicule peu de temps après avoir quitté son lieu de travail, était décédé des suites de cet accident.

« Attendu que, pour déclarer Marcel Y… et Saad X… coupables de non-assistance à personne en danger, l’arrêt énonce, par les motifs partiellement repris au moyen, qu’ils ont eu conscience qu’Aurélien Z… n’était pas en état de conduire, que Marcel Y… savait, en quittant le dépôt, qu’Aurélien Z… voulait prendre sa voiture pour rentrer chez lui et que Saad X… aurait pu, sans employer la force et sans risque pour lui-même, maintenir la barrière fermée pour l’empêcher de sortir ; »

L’employeur qui avait organisé ce repas et qui était poursuivi pour homicide involontaire par les parents du salarié, a été relaxé au motif qu’il avait appris seulement après les faits qu’une bouteille d’eau de vie de poire, boisson prohibée sur les lieux du travail, avait circulé à la fin du repas entre les convives, et qu’il n’était pas parvenu à savoir quel convive avait apporté cet alcool. De plus, il avait déjà quitté les locaux où se déroulait le repas lorsque cet alcool avait circulé. Enfin, il n’est pas établi que la forte consommation d’alcool du salarié décédé était liée à cette eau de vie qui avait circulée.

Par contre, si la moindre imprudence ou manquement aux obligations de sécurité ou de prudence de l’employeur avait été relevé dans cette affaire, il est fort probable que l’employeur aurait aussi été condamné.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000007634525&fastReqId=316757474&fastPos=1

Condamnation d’un DG et d’un DRH pour surreprésentation de l’employeur au CHSCT

Dans un arrêt du 28 novembre 2017, la Chambre criminelle de la Cour de cassation a confirmé que le fait qu’assiste à la réunion du CHSCT, présidée par la responsable des ressources humaines, le directeur général ainsi que cinq directeurs d’établissement, sans qu’ait été recueilli préalablement l’assentiment exprès des membres du CHSCT, constitue un délit d’entrave.

Pour cette surreprésentation, le DG a été condamné à une amende de 1 500 euros, la DRH à une amende de 1 000 euros et la société à une amende de 5 000 euros.

Pour information, cette surreprésentation avait pour but de faire des reproches à la délégation du personnel pour qu’elle revînt sur sa décision de recours à une expertise en raison de la constatation d’un risque grave pour les salariés.

Cass. Crim. 28 novembre 2017 N° de pourvoi : 16-86138

 

 

La divulgation des salaires des collègues = faute grave

La divulgation des salaires de ses collègues justifie un licenciement pour faute grave.

Le 22 novembre 2017, la Cour de cassation a en effet jugé que « la cour d’appel qui a constaté que la salariée avait divulgué à un salarié le montant des salaires perçus par certains de ses collègues, manquant ainsi aux règles de confidentialité lui incombant au regard des fonctions exercées et étant de nature à créer des difficultés au sein de l’entreprise, a pu en déduire que ce manquement constituait une faute grave rendant impossible son maintien dans l’entreprise ».

Il convient de préciser que la salariée était responsable administrative, elle était sans antécédent disciplinaire et avait 2,5 ans d’ancienneté.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000036092003&fastReqId=1077669696&fastPos=1

 

Employeurs : Former vos salariés à la prévention des faits de harcèlement moral, vous ferez des économies en cas de contentieux

Dans un arrêt du 1er juin 2016, la Cour de cassation vient d’opérer un revirement important de jurisprudence en matière de harcèlement moral.

Alors que depuis 2010, elle estimait qu’à partir du moment où un salarié avait subi des faits de harcèlement moral sur son lieu de travail, l’employeur même s’il n’avait commis aucune faute devait être tenu pour responsable, la Cour de cassation pose à présent le principe suivant :

L’employeur peut désormais s’exonérer de sa responsabilité en matière de harcèlement moral, quand un tel harcèlement s’est produit dans l’entreprise, aux conditions suivantes :

– il a pris toutes les mesures immédiates propres à faire cesser le harcèlement moral et il l’a fait cesser effectivement ;

– il a pris toutes les mesures de prévention visées aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et notamment il a préalablement mis en œuvre des actions d’information et de formation propres à prévenir la survenance de faits de harcèlement moral.

En l’espèce, l’employeur avait modifié son règlement intérieur pour y insérer une procédure d’alerte en matière de harcèlement moral. Il avait mis en œuvre cette procédure dès qu’il a eu connaissance du conflit personnel du salarié avec son supérieur hiérarchique en organisant immédiatement une enquête interne sur la réalité des faits ainsi qu’une réunion de médiation avec le médecin du travail, le directeur des ressources humaines et trois membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail et avait pris la décision au cours de cette réunion d’organiser une mission de médiation pendant trois mois entre les deux salariés en cause (mission confiée au directeur des ressources humaines).

La Cour de cassation estime que c’est insuffisant pour exonérer l’employeur de sa responsabilité car il ne résulte pas des constatations de la Cour d’Appel que l’employeur ait pris toutes les mesures de prévention visées aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et, notamment, ait mis en œuvre des actions d’information et de formation propres à prévenir la survenance de faits de harcèlement moral.

Pour rappel, voici le contenu de ces articles maintenant fondamentaux, y compris dans d’autres matières que celle du harcèlement moral, pour exonérer la responsabilité des employeurs :

Article L4121-1 du Code du travail :

« L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;

2° Des actions d’information et de formation ;

3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes. »

Article L4121-2 du Code du travail :

L’employeur met en œuvre les mesures prévues à l’article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :

1° Eviter les risques ;

2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;

3° Combattre les risques à la source ;

4° Adapter le travail à l’homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;

5° Tenir compte de l’état d’évolution de la technique ;

6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n’est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;

7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu’ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1 ;

8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;

9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs. »

 

Cass. soc., 1er juin 2016, n°  14-19.702

https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_sociale_576/1068_1er_34378.html

 

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Constat d’Huissier : preuve recevable pour un licenciement pour faute lourde même sans vérification de l’identité du salarié

Dans un arrêt récent du 3 mai 2016, la Cour de cassation accepte la preuve apportée par un constat d’Huissier qui établit que des salariés, dont les noms ont été indiqués dans le constat sur la simple indication du responsable des ressources humaines du site, continuent le blocage de l’entreprise malgré la notification de l’arrêt de justice déclarant la grève illégale.

Or, les salariés contestaient leur présence sur le site dans le cadre de ce blocage illégal et invoquaient le fait que le constat d’Huissier, qui n’avait pas vérifié personnellement l’identité des salariés sur place et avait juste noté les noms indiqués par le DRH, était illégale et contraire au principe de l’égalité des armes de l’article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

La Cour de cassation ne suit pas ce raisonnement et décide « qu’il revient aux juges du fond d’apprécier souverainement la valeur et la portée des constats d’huissiers, lesquels sont soumis à la libre discussion des parties lors du débat contradictoire devant la juridiction ; qu’il en résulte l’absence d’atteinte au principe de l’égalité des armes au sens de l’article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme ; »

Ces constats ayant été appréciés par les juges du fond comme apportant la preuve de la présence des salariés lors du blocage illicite, leur licenciement pour faute lourde est confirmé par la Cour de cassation.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032501612&fastReqId=529342398&fastPos=1

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