Licenciement pendant le confinement 2

Interview de Marielle Vannier pour Dossier Familial par Timour Aggiouri :

Le gouvernement de Jean Castex incite les employeurs à conserver leurs salariés malgré la récession et le nouveau confinement, mis en œuvre depuis le 30 octobre contre l’épidémie de Covid-19. Il facilite le recours au dispositif d’activité partielle – chômage partiel dans le langage courant –, en vue de limiter le nombre de pertes d’emploi et de faciliter la reprise.

Mais l’exécutif n’a pas interdit les licenciements. Il a maintenu le cadre de la rupture du contrat à durée indéterminée (CDI) à l’initiative de l’employeur. Différentes règles protectrices continuent à bénéficier aux salariés susceptibles d’être licenciés durant la crise sanitaire.

L’impossibilité de poursuivre l’activité de l’entreprise en raison du confinement peut-elle justifier un licenciement ?

Non. « Un licenciement uniquement lié au confinement ne peut être justifié, puisque l’employeur a la possibilité de recourir à l’activité partielle, explique à Dossier Familial Marielle Vannier, avocate à Meudon (Hauts-de-Seine). L’employeur risquerait d’être condamné pour un licenciement sans cause réelle et sérieuse, sauf à prouver que la gravité de la situation de l’entreprise dépasse le cadre du confinement. »

La crise sanitaire ne peut constituer une force majeure justifiant un licenciement, « sauf dans des cas extrêmes », estime notre interlocutrice, relevant qu’« il y a un débat parmi les juristes sur ce sujet ». La CFDT précise sur le site du syndicat que les conseils de prud’hommes et les cours d’appel seront amenés à se prononcer « si la question devait leur être posée ».

Toutefois, « par rapport au premier confinement, les avocats atténuent leur recommandation de ne pas licencier. Compte tenu des difficultés économiques et des prévisions économiques très pessimistes, un licenciement pour motif économique peut se justifier », précise Me Vannier. « Les avocats des employeurs devront sûrement prouver devant les juges du fond que les aides gouvernementales ne permettent pas d’éviter les suppressions de poste », ajoute l’avocate.

 

Des procédures de licenciement peuvent-elles aboutir durant le confinement ?

Oui, rien n’empêche les procédures de licenciement d’arriver à leur fin. L’employeur peut respecter durant le confinement le schéma des procédures de licenciement, qui repose sur trois étapes : la convocation à un entretien préalable, ce rendez-vous et la notification du licenciement par lettre recommandée avec accusé de réception.

« La Poste ne s’est pas arrêtée, elle fonctionne normalement, observe Marielle Vannier. Je ne rencontre pas de souci sur l’envoi des lettres recommandées. »

L’organisation de l’entretien préalable pose certes problème, dans l’hypothèse où le salarié et l’employeur ne comptent pas faire de déplacement pour se rendre dans les locaux de l’entreprise.  « Aucun texte ne prévoit qu’un entretien préalable par visio-conférence est valable. Aucune mesure dérogatoire n’a été prise en ce sens, comme pour les réunions du comité social et économique », indique l’avocate.

Sur la validité de cette étape du licenciement par visio-conférence, les décisions des cours d’appel vont dans des sens opposés. 

« Si l’employeur tient à mener un entretien par ce biais, le risque est limité pour lui : il ne s’agirait que d’un vice de procédure. Dans un arrêt du 7 janvier 2020, la cour d’appel de Grenoble a condamné à 500 € de dommages et intérêts un employeur concerné », observe Marielle Vannier. D’après la juriste, une condamnation est possible si le salarié parvient à prouver que le vice de procédure lui a causé un préjudice et à évaluer ce dernier. Le montant maximal qui lui est dû est plafonné à 1 mois de salaire. Quelle que soit la solution, le licenciement n’est pas remis en cause.

« Lorsque j’accompagne un employeur dans une procédure de licenciement, je lui conseille de laisser le choix au salarié entre un entretien par visio-conférence ou dans un bureau », rapporte Me Vannier.

 

Les conseils de prud’hommes accueillent-ils toujours des saisines ?

Oui, les conseils de prud’hommes, tout comme les cours d’appel, susceptibles de trancher en seconde instance des litiges individuels de travail, continuent à accueillir les saisines des salariés ou de leur avocat. « En mars, une audience dans une affaire où j’interviens a été reportée au mois de novembre. Elle va pouvoir avoir lieu », se félicite Marielle Vannier.

Alors que les délais de prescription avaient été suspendus par ordonnance durant le précédent confinement, le président de la République n’a pas pris de mesure similaire. Si vous souhaitez agir en justice contre votre (ancien) employeur, n’attendez pas.

 

https://www.dossierfamilial.com/actualites/emploi/licenciement-pendant-la-crise-sanitaire-quels-sont-vos-droits-433496

 

 

Tant bien que mal, la justice poursuit son activité durant le confinement

Interview de Marielle Vannier pour Dossier Familial par Timour Aggiouri : Vous avez le droit de vous rendre dans une juridiction si vous êtes partie ou témoin à un procès. Mais entre reports d’audience et risque de contamination au Covid-19, la crise sanitaire a un sérieux impact sur le fonctionnement du service public de la justice… https://www.dossierfamilial.com/actualites/vie-pratique/tant-bien-que-mal-la-justice-poursuit-son-activite-durant-le-confinement-872309

Licenciement pendant le confinement 1

Interview de Marielle Vannier pour Dossier Familial par Timour Aggiouri :

Le gouvernement d’Edouard Philippe incite les employeurs à conserver leurs salariés malgré la récession. Il a amélioré le dispositif d’activité partielle – chômage partiel dans le langage courant –, en vue de limiter de pertes d’emploi et de faciliter la reprise à la sortie de la crise sanitaire.

Mais l’exécutif n’a pas interdit les licenciements. S’il a assoupli les règles du temps de travail dans une ordonnance du 25 mars, il a maintenu le cadre de la rupture du contrat à durée indéterminée (CDI) à l’initiative de l’employeur. Différentes règles protègent les salariés licenciés durant la crise sanitaire.

L’impossibilité de poursuivre l’activité de l’entreprise en raison du confinement peut-elle justifier un licenciement ?

Non. « Un licenciement uniquement lié au confinement ne peut être justifié, puisque l’employeur a la possibilité de recourir à l’activité partielle, explique à Dossier Familial Marielle Vannier, avocate à Meudon (Hauts-de-Seine). L’employeur risquerait d’être condamné pour un licenciement sans cause réelle et sérieuse, sauf à prouver que la gravité de la situation de l’entreprise dépasse le cadre du confinement. »

De plus, la situation de confinement ne peut constituer une force majeure justifiant un licenciement, « sauf dans des cas extrêmes », estime notre interlocutrice, convenant qu’« il y a un grand débat parmi les juristes sur ce sujet ».

Le service juridique de la CFDT précise sur le site du syndicat que les conseils de prud’hommes et les cours d’appel seront amenés à se prononcer « si la question devait leur être posée ».

Selon Me Vannier, « tous les avocats dissuadent les employeurs de licencier à l’heure actuelle ».

Des procédures de licenciement peuvent-elles aboutir durant le confinement ?

« En théorie, oui, répond Marielle Vannier. Mais dans la pratique, faire aboutir une procédure  est compliqué. » Les procédures de licenciement reposent sur trois étapes que sont la convocation à un entretien préalable, ce rendez-vous et l’envoi d’une lettre de licenciement. L’employeur peut avoir des difficultés à respecter ce schéma durant le confinement.

« La Poste ne fonctionne pas de manière optimale pendant le confinement, remarque Me Vannier. La lettre recommandée électronique pour notifier un licenciement peut présenter en outre un aléa juridique pour l’employeur, puisqu’à notre connaissance aucune décision de la Cour de Cassation n’est venue confirmer la validité de ce procédé. Pour sécuriser au maximum un licenciement, il vaut donc mieux qu’un employeur passe par un huissier de justice. »

L’organisation de l’entretien préalable pose problème, dans l’hypothèse où le salarié et l’employeur ne comptent pas faire de déplacement pour se rendre dans les locaux de l’entreprise. « Aucun texte ne prévoit qu’un entretien préalable par visio-conférence est valable. Aucune mesure dérogatoire n’a été prise en ce sens, comme pour les réunions du conseil social et économique », remarque l’avocate.

Sur la validité de cette étape du licenciement par visio-conférence, les décisions des cours d’appel vont dans des sens opposés.

« Si l’employeur tient à mener un entretien par ce biais, le risque est limité pour lui : il ne s’agirait que d’un vice de procédure, indique Marielle Vannier. Dans un arrêt du 7 janvier 2020, la cour d’appel de Grenoble a condamné à 500 € de dommages et intérêts un employeur concerné. » Quelle que soit la solution, le licenciement n’est pas remis en cause.

Les conseils de prud’hommes accueillent-ils toujours des saisines ?

Depuis le 16 mars, la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, a ordonné la fermeture des juridictions, « sauf pour les contentieux essentiels », selon un communiqué du ministère de la Justice. Les litiges traités par les prud’hommes ne figurent pas dans cette catégorie. Si vous adressez une saisine par lettre auprès d’un conseil pour contester un licenciement, vous risquez fort de voir votre demande non traitée.

« S’agissant du conseil de prud’hommes de Paris, les lettres de saisine reviennent aux expéditeurs », affirme Me Vannier.

« Le conseil de Nanterre, le deuxième de France, a mis en place la possibilité de saisir son président et son vice-président en cas de grande urgence, mais il n’a pas encore précisé ce que cette dernière recouvre », poursuit la juriste, estimant qu’il peut s’agir notamment des situations où l’employeur ne paye plus ses salariés, ne recourt pas au chômage partiel et n’a pas déclaré la cessation de paiement au tribunal de commerce.

L’absence de traitement des contentieux n’a pas d’impact sur les droits des salariés à saisir la justice : les délais de prescription sont suspendus, en application d’une ordonnance du 25 mars.

En attendant que la justice reprenne son activité ordinaire, si vous souhaitez obtenir une indemnisation, préparez les négociations avec votre ancien employeur. La négociation est en effet obligatoire avant de saisir le conseil de prud’hommes. Marielle Vannier le rappelle : « Différents arguments de fait et des preuves comme les témoignages doivent être rassemblés, et cela prend du temps. » Vous pourrez vous appuyer sur ces éléments lors de la négociation puis, si cette dernière échoue, pour obtenir gain de cause de cause devant le conseil de prud’hommes.

https://www.dossierfamilial.com/actualites/emploi/licenciement-pendant-la-crise-sanitaire-quels-sont-vos-droits-433496

Grève: les 10 points-clés à retenir avant d’opter pour le télétravail

Interview de Marielle VANNIER par LE FIGARO

Grève: les 10 points-clés à retenir avant d’opter pour le télétravail

Moins de formalités, plus de souplesse… Depuis les ordonnances Macron, les salariés peuvent plus facilement travailler à la maison.

Les journées de grève se succèdent, avec leur lot de perturbations dans les transports en commun et de bouchons sur les routes. Pour remédier à ces désagréments, de nombreux salariés optent pour le télétravail. Qu’il soit ponctuel (en cas de grève des transports, par exemple) ou régulier, le télétravail peut être mis en place assez facilement et fonctionner de manière très souple. Mais l’employeur conserve une grande lattitude pour autoriser ou pas des salariés à travailler de chez eux.

  1. Le télétravail est possible même en l’absence d’accord collectif

De nombreuses entreprises ont négocié un accord collectif avec les organisations syndicales. Le texte précise par exemple les catégories de salariés dont les fonctions sont compatibles avec le télétravail, les horaires auxquels ils doivent éventuellement rester disponibles ou joignables, les conditions dans lesquelles l’entreprise peut mettre fin au télétravail, etc… Mais l’employeur peut aussi décider de mettre en place unilatéralement une charte qui fixe les règles du jeu. Si ni l’un ni l’autre n’existent dans l’entreprise, il est possible de télétravailler malgré tout: il suffit que le salarié qui le souhaite et son employeur se mettent d’accord, qu’il s’agisse de télétravail ponctuel ou pérenne (une journée par semaine, par exemple).

  1. L’accord entre le salarié et l’employeur doit être formalisé

«Un simple accord verbal comporte des risques», insiste Marielle Vannier, avocate spécialiste du droit du travail. Les juges ont ainsi récemment donné raison à une entreprise qui avait licencié pour faute un salarié. Il refusait de renoncer au télétravail que l’entreprise avait autorisé oralement, ce qu’il n’a pas pu prouver. «Un simple e-mail ou SMS est une preuve suffisante, précise l’avocate. Mais, surtout si aucun accord collectif n’établit les règles du jeu, il reste conseillé – bien que cela ne soit plus obligatoire – de rédiger un avenant au contrat de travail. Il précisera, par exemple, les horaires ou les conditions auxquelles l’employeur pourra revenir sur cet accord.» Un accident à domicile par exemple est considéré comme un accident du travail s’il se déroule pendant les heures de travail. Mais si celles-ci n’ont pas été clairement précisées, la frontière devient plus floue.

  1. Le salarié peut changer d’avis

«Il peut à tout moment, sans préavis, revenir à son poste dans l’entreprise», rappelle Caroline André-Hesse du cabinet AyacheSalama. Cette disposition a été prise pour prévenir les troubles psychosociaux: certains salariés vivent mal l’isolement.

  1. L’employeur ne peut mettre fin au télétravail sans préavis

Les accords collectifs prévoient souvent que l’employeur peut «résilier» l’autorisation de télétravailler un ou plusieurs jours par semaine, en respectant un préavis. «Mais s’il n’y a pas d’accord collectif et si aucun avenant au contrat de travail ne fixe les conditions de ce revirement, l’entreprise ne peut supprimer unilatéralement le télétravail du salarié», relève Caroline André-Hesse. En pratique, il est bien sûr difficile de tenir tête à un employeur qui exige le retour au bureau. Au moins peut-on tenter de négocier un délai de grâce…

  1. L’entreprise garde un pouvoir discrétionnaire

Même s’il a accordé la possibilité de télétravailler à un de vos collègues, qui a les mêmes fonctions, votre employeur peut, sans explications, vous refuser la même souplesse, dès lors que le télétravail n’est pas encadré dans l’entreprise par un accord collectif ou une charte. C’est seulement si vous êtes handicapé ou «proche aidant» (vous assistez au quotidien un de vos proches invalides) qu’il doit motiver son refus. «Mais il ne peut pas déroger au principe de l’égalité de traitement entre les salariés: il faut que sa décision s’explique par un critère objectif», souligne Isabelle Pontal, avocate au cabinet Jeantet. Il est rare qu’un salarié attaque en justice pour cette raison. Mais c’est parfois un argument supplémentaire dans un dossier déposé devant les juges pour d’autres motifs: non content par exemple de licencier abusivement son collaborateur, l’employeur avait par exemple déjà fait preuve de discrimination – par l’âge, le sexe… – en refusant le télétravail au plaignant alors qu’il l’autorisait à d’autres.

  1. L’employeur peut refuser même si vous remplissez si les conditions prévues

L’accord collectif ou la charte peut limiter les conditions d’accès au télétravail (ancienneté minimale dans l’entreprise, …). «Si vous remplissez ces conditions et que l’employeur refuse quand même, il doit au moins motiver son refus, par des critères objectifs: vos résultats, les caractéristiques de votre poste?», précise Isabelle Pontal.

  1. Dans certains cas, refuser est délicat

Lorsque le télétravail est recommandé par le médecin du travail, les employeurs sont plus prudents. «Même s’il n’y a pas encore de jurisprudence sur ce sujet, ils risquent d’être en tort en allant contre l’avis du médecin», souligne Marielle Vannier. De même, en cas de forte pollution ou d’épidémie, un employeur qui exposerait ses collaborateurs à des risques pour leur santé en ne proposant pas le télétravail pourrait se le voir reprocher, estime-t-elle.

  1. L’employeur n’est pas obligé de fournir un ordinateur

Le salarié doit se débrouiller pour disposer de l’équipement nécessaire chez lui: l’employeur n’est plus contraint de financer le matériel. En pratique, le problème se pose moins aujourd’hui, car les salariés sont de plus en plus souvent dotés d’outils nomades, qu’ils emportent chez eux.

  1. Vous pouvez recevoir une indemnité

«L’entreprise est censée indemniser le collaborateur pour les frais correspondants au télétravail, parce que par exemple il y consacre un endroit chez lui», indique Caroline André-Hesse. Certaines entreprises accordent à ce titre par exemple 70 à 100 euros par mois, quand le télétravail est régulier. Cela se justifie notamment quand, grâce à cette solution, l’entreprise réalise des économies sur la surface de bureaux nécessaire pour accueillir tous les salariés. Mais aucun minimum légal n’étant prévu, l’employeur peut aussi faire l’impasse.

  1. Vous devez avertir votre assureur

En principe, l’employeur doit vérifier que la sécurité du salarié est assurée dans son logement ou, au moins, lui demander une attestation sur l’honneur. Le salarié doit, de son côté, avertir son assureur qu’il télétravaille régulièrement chez lui. Mais si l’ordinateur du bureau est volé à son domicile, c’est l’assurance de l’entreprise qui jouera.

Anne BODESCOT
Journaliste
https://www.lefigaro.fr/decideurs/teletravail-les-10-points-cles-a-retenir-20191203

 

Interview de Marielle VANNIER pour LE FIGARO

Inégalité salariale: les stratégies à adopter pour obtenir gain de cause

NOS CONSEILS – Pour les femmes moins bien payées que leurs collègues masculins, décrocher un rattrapage nécessite un peu de méthode.

Combien vos collègues masculins gagnent-ils de plus que vous? En moyenne, en France, 21,8% si vous êtes cadre et près de 11% si vous êtes ouvrier. Cette pratique est pourtant interdite et, régulièrement, les prud’hommes dédommagent les femmes victimes de ces discriminations salariales. Une ex-employée de Generali Vie vient ainsi d’obtenir 161.000 euros, pour compenser un écart de salaire de plusieurs centaines d’euros par mois pendant plus de 40 ans.

» LIRE AUSSI – Les 3 chiffres de l’inégalité salariale entre les hommes et les femmes

Si vous vous estimez sous-payée, à fonctions et compétences similaires, parce que vous êtes une femme, le premier défi est de réunir des preuves. Vos collègues masculins accepteront peut-être de parler de leur rémunération, voire de donner copie de leurs bulletins de salaires, notamment s’ils quittent l’entreprise. Parlez-en aussi aux représentants du personnel, bien informés, qui pourront vous dire si, dans l’entreprise, l’indice d’égalité homme-femme corrobore votre conviction. «Ils peuvent aussi souvent consulter le registre du personnel, explique Rachel Silvera, maître de conférences à l’université de Nanterre et auteur d’Un quart en moins (La Découverte). Cela permet de découvrir, par exemple, que dès votre embauche, votre salaire était dans la fourchette basse de ceux d’autres salariés arrivés comme vous sur une fonction comparable, et que l’écart a augmenté au cours des années.»

Il faut commencer par négocier

Une fois sûre de vos arguments, interrogez votre supérieur et le service des ressources humaines: comment expliquent-ils cet écart de rémunération? Peut-être obtiendrez-vous ainsi un réajustement de salaire. Mais l’entreprise peut aussi hésiter à vous donner satisfaction, en particulier si vous demandez compensation pour le retard accumulé les années passées. Elle craindra que votre cas ne fasse école et que d’autres salariées s’engagent sur la même voie.

Si vous décidez d’aller plus loin, votre situation dans l’entreprise risque de devenir inconfortable. «Les entreprises hésitent à licencier une salariée qui engage une procédure pour faire valoir ses droits car c’est interdit: elles risquent de devoir un jour la réintégrer à son poste et lui régler les salaires dont elle a été indûment privée», explique Marielle Vannier, avocate spécialiste du droit du travail. Mais votre carrière en souffrira probablement. Vous vous exposez à des reproches, des brimades?

Des procédures de plus en plus nombreuses

«Les femmes sont de plus en plus nombreuses à engager des procédures pour inégalités salariales, ajoute Marielle Vannier. Mais elles le font surtout quand elles partent de l’entreprise (pour un autre job ou à la retraite), ou lorsqu’elles attaquent l’employeur pour une autre raison principale (licenciement abusif, etc.), à laquelle elles ajoutent alors l’écart de salaire.»

» LIRE AUSSI – Inégalités salariales: existe-t-il vraiment un écart «inexpliqué» entre hommes et femmes?

Avant d’engager une action – souvent longue – devant les prud’hommes, il est possible de saisir l’inspection du travail, si elle n’est pas débordée. Elle peut exiger de l’entreprise communication de l’historique des rémunérations de vos collègues, pour se faire son propre avis. Idem pour le Défenseur des droits, dont l’avis est consultatif. Mais les dossiers sont nombreux et, le plus souvent, s’il n’est pas possible de négocier, même avec l’aide d’un avocat, attaquer en justice reste la seule issue.

Déjouer les pièges

Outre la procédure devant les prud’hommes elle-même, une autre action, en référé, est parfois nécessaire pour obliger l’entreprise à vous fournir les preuves (bulletins de salaires, contrats de travail?). Les avocats conseillent même d’y ajouter les entretiens d’évaluation qui comportent des précisions sur les qualités professionnelles des uns et des autres. Elles sont susceptibles d’expliquer ou non une différence de salaire.

«Les entreprises tentent en effet de justifier la différence de rémunérations entre hommes et femmes par des résultats, des diplômes différents, une expérience professionnelle antérieure, ou davantage d’ancienneté dans la fonction, par exemple», explique Judith Bouhana, avocate en droit du travail. Pour montrer qu’il s’agit bien d’une discrimination homme-femme, il est utile de prouver l’égalité des compétences et des responsabilités.

Faites-vous accompagner très tôt par un avocat pour déjouer les inévitables pièges. «Par exemple, il peut être important d’attaquer rapidement pour éviter d’être licenciée avant sous un autre prétexte: c’est seulement une fois la procédure engagée que la salariée pourra mieux se défendre», relève Judith Bouhana.

Attention à la prescription de 5 ans

Gare aussi à la prescription: elle est de cinq ans à partir du moment où vous avez connaissance de cette discrimination salariale. Envoyer un courrier pour demander les raisons d’un écart de salaire avec un collègue masculin suffit à enclencher le compte à rebours. Gare donc aux écrits…

En revanche, si les juges vous donnent raison, vous pouvez obtenir le paiement de la différence de salaire pour toutes les années où vous avez été «sous-payée», bien au-delà de ces cinq dernières années. «Ils peuvent même aussi reconnaître un préjudice en matière de retraite, précise Me Marielle Vannier, puisque, moins payée, vous avez moins cotisé.»

Anne BODESCOT, Journaliste

https://www.lefigaro.fr/decideurs/expertise/inegalite-salariale-comment-les-femmes-peuvent-obtenir-gain-de-cause-20191121

 

 

Le barème Macron est validé par la Cour de cassation

Avis n°15012 et 15013 du 17 juillet 2019 de la Cour de cassation.

Extraits de la note explicative de la Cour de cassation sur ces 2 avis :

L’article L. 1235-3 du code du travail, met en place un barème applicable à la fixation par le juge de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, celle-ci devant être comprise entre des montants minimaux et maximaux ; les montants maximaux varient, selon l’ancienneté du salarié, entre un et vingt mois de salaire brut.

La formation plénière de la Cour de cassation s’est prononcée le 17 juillet 2019 pour avis sur deux demandes d’avis formulées par des conseils de prud’hommes, relatives à la compatibilité de ce texte avec des normes européennes et internationales.

Elle a estimé que les dispositions de l’article 24 de la Charte sociale européenne révisée n’étaient pas d’effet direct.

Elle a estimé que l’article 10 de la Convention n° 158 sur le licenciement de l’OIT, était, quant à lui, d’application directe en droit interne.

La formation plénière en a déduit que les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail, qui fixent un barème applicable à la détermination par le juge du montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et prévoient notamment, pour un salarié ayant une année complète d’ancienneté dans une entreprise employant au moins onze salariés, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse comprise entre un montant minimal d’un mois de salaire brut et un montant maximal de deux mois de salaire brut, étaient compatibles avec les stipulations de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’OIT, l’Etat n’ayant fait qu’user de sa marge d’appréciation.

https://www.courdecassation.fr/IMG///20190717_note_avis_15012_15013.pdf

https://www.courdecassation.fr/43209

https://www.courdecassation.fr/43210    

 

Restitution de rémunération variable et baisse de l’indemnité de licenciement pour les traders

Avec la Loi PACTE, les traders peuvent à présent voire leur rémunération variable (en tout ou partie) non-prise en compte dans la base de calcul de leur indemnité de licenciement ainsi que des indemnités accordées par les juges en cas de licenciement nul ou abusif.

De plus, la Loi PACTE prévoit expressément pour les traders une exception au principe de l’interdiction de toute sanction pécuniaire en matière droit du travail. Le nouvel article L511-84-1 du Code Monétaire et Financier prévoit désormais que : « Par dérogation à l’article L. 1331-2 du code du travail, le montant total de la rémunération variable peut, en tout ou partie, être réduit ou donner lieu à restitution lorsque la personne concernée a méconnu les règles édictées par l’établissement en matière de prise de risque, notamment en raison de sa responsabilité dans des agissements ayant entraîné des pertes significatives pour l’établissement ou en cas de manquement aux obligations d’honorabilité et de compétence. »

Les traders sont définis par la Loi comme « des preneurs de risques au sens des articles 3 et 4 du règlement délégué (UE) n° 604/2014 de la Commission du 4 mars 2014 complétant la directive 2013/36/ UE du Parlement européen et du Conseil par des normes techniques de réglementation en ce qui concerne les critères qualitatifs et quantitatifs appropriés permettant de recenser les catégories de personnel dont les activités professionnelles ont une incidence significative sur le profil de risque d’un établissement ».

Article 77 de LOI PACTE n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises

https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000038496102&categorieLien=id#JORFARTI000038496272

Attention à l’avenant au contrat de travail quelques jours après un entretien disciplinaire

La Cour de cassation dans un arrêt du 9 mai 2019 juge que la modification du contrat de travail constitutive d’une rétrogradation du salarié (en l’espèce baisse de sa qualification et de son nombre d’heures de travail) proposée après l’entretien préalable à une sanction disciplinaire, doit être qualifié de sanction disciplinaire.

 

L’avenant mettant en place cette rétrogradation et signé par la salariée a été annulé car selon la Cour de cassation il s’agit d’une sanction mise en œuvre sans avoir fait l’objet d’une notification écrite motivée et sans que l’employeur ait informé la salariée de sa faculté d’accepter ou de refuser cette rétrogradation.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000038488759&fastReqId=1298539968&fastPos=1

Priorité de réembauchage et délai fixé par l’employeur pour accepter le poste :

Dans un arrêt du 17 avril 2019, la Cour de cassation estime que dans le cadre de la priorité de réembauchage qui fait suite à un licenciement économique :

  • l’employeur peut assortir la proposition de réembauche d’un délai raisonnable pour l’accepter dont la durée est fixée unilatéralement par lui,
  • pour savoir si le salarié a accepté l’offre dans le délai fixé, il convient de se positionner au jour de la 1ère présentation de sa lettre acceptant le poste proposé.

En l’espèce, après avoir licencié pour motif économique une salariée, la société lui propose un poste par courrier du 23 avril et lui laisse un délai de 10 jours pour accepter cette offre. Par lettre recommandé du 28 avril, la salariée accepte l’offre mais cette réponse favorable n’ait présenté par La Poste que le 6 mai à la société. La société répond à la salariée que son acceptation a été tardive et que le poste proposé a été pourvu entre temps.

La Cour de cassation confirme que la salariée avait fait parvenir sa réponse à la proposition de réembauche après le délai fixé par l’employeur. C’est donc la date de 1ère présentation de la lettre qui a été prise en compte par la Cour de cassation pour le décompte du délai fixé par l’employeur.

Cour de cassation, chambre sociale, 17 avril 2019, N° de pourvoi : 17-21175 17-21289

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000038440467&fastReqId=1851231802&fastPos=1